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Une nouvelle façon de former les planètes

Des chercheurs des universités de Zurich et de Cambridge, associés au Pôle de recherche national suisse PlanetS, proposent une nouvelle explication à la multitude d’exoplanètes de masse intermédiaire, une énigme de longue date en astronomie.

Simulation du disque protoplanétaire avec les lignes de champ magnétique. Image: Jean Favre (CSCS).

Au cours des 25 dernières années, les astronomes ont découvert plus de 4000 planètes au-delà des frontières de notre système solaire. Qu’il s’agisse de mondes rocheux et aquatiques relativement petits ou de géantes gazeuses à la chaleur étouffante, le monde des planètes présente une remarquable diversité. Cette variété n’est pas surprenante puisque les modèles informatiques sophistiqués, avec lesquels les scientifiques étudient la formation des planètes, donnent naissance à des planètes très différentes. Ce que les modèles ont plus de mal à expliquer, c’est la distribution de masse observée des planètes découvertes autour d’autres étoiles. La majorité d’entre elles appartiennent à la catégorie des masses intermédiaires soit des planètes dont la masse varie de plusieurs masses terrestres à environ celle de Neptune (15 fois la Terre). Même dans le contexte du système solaire, la formation d’Uranus et de Neptune reste un mystère. Des scientifiques des universités de Zurich et de Cambridge, associés au PRN PlanetS, ont proposé une autre explication étayée par des simulations poussées. Leurs résultats ont été publiés dans la revue scientifique Nature Astronomy.

Deux forces opposées…

Lucio Mayer est professeur d’astrophysique numérique à l’Université de Zurich. Image: Robert Huber

“Lorsque des planètes se forment à partir du disque protoplanétaire de gaz et de poussière, les instabilités gravitationnelles pourraient être le mécanisme moteur”, explique Lucio Mayer, co-auteur de l’étude, professeur d’astrophysique numérique à l’Université de Zurich et membre du PRN PlanetS. Dans ce processus, la poussière et le gaz du disque s’agglomèrent sous l’effet de la gravité et forment des structures spirales denses. Celles-ci se transforment ensuite en blocs de composants planétaires et finalement en planètes.

L’échelle à laquelle ce processus se produit est très grande, elle s’étend à la taille du disque protoplanétaire. “Mais sur des distances plus courtes, à l’échelle d’une seule planète, une autre force domine : celle des champs magnétiques qui se développent à côté des planètes”, précise Lucio Mayer. Ces champs magnétiques brassent le gaz et la poussière du disque et influencent ainsi la formation des planètes. “Pour obtenir une image complète du processus de formation des planètes, il est donc important de ne pas se contenter de simuler la structure spirale à grande échelle dans le disque. Les champs magnétiques à petite échelle qui entourent les blocs planétaires en croissance doivent également être pris en compte”, explique l’auteur principal de l’étude, Hongping Deng, ancien doctorant de Lucio Mayer et désormais chercheur à l’université de Cambridge.

…qui sont difficiles à saisir simultanément.

Hongping Deng est chercheur postdoctoral à l’Université de Cambridge. Image: Hongping Deng

Cependant, les différences d’échelle et de nature entre la gravité et le magnétisme font que ces deux forces sont très difficiles à intégrer dans un même modèle de formation planétaire. Jusqu’à présent, les simulations informatiques qui rendaient bien les effets de l’une des forces ne donnaient généralement pas de bons résultats avec l’autre. Pour réussir, l’équipe a développé une nouvelle technique de modélisation qui a nécessité une expertise dans un certain nombre de domaines différents. Tout d’abord, les chercheurs ont dû acquérir une compréhension théorique approfondie de la gravité et du magnétisme, puis ont dû trouver un moyen de traduire cette compréhension en un code capable de calculer efficacement ces forces contrastées à l’unisson. Enfin, en raison de l’immense nombre de calculs nécessaires, un ordinateur puissant comme le “Piz Daint” du Centre national suisse de supercalcul (CSCS) a été nécessaire. “Outre les connaissances théoriques et les outils techniques que nous avons développés, nous étions également tributaires de l’évolution de la puissance de calcul”, explique Lucio Mayer.

Une énigme vieille de plusieurs décennies résolue ?

Ravit Helled est professeur d’astrophysique théorique à l’Université de Zurich. Image credit: Jos Schmid

Contre toute attente, tout s’est réuni au bon moment et a permis une percée. “Avec notre modèle, nous avons pu montrer pour la première fois que les champs magnétiques rendent difficile pour les planètes en croissance de continuer à accumuler de la masse au-delà d’un certain point. Par conséquent, les planètes géantes deviennent plus rares et les planètes de masse intermédiaire beaucoup plus fréquentes, un peu comme ce que nous observons dans la réalité”, explique Hongping Deng.

“Ces résultats ne sont qu’une première étape, mais ils montrent clairement l’importance de prendre en compte davantage de processus physiques dans les simulations de formation de planètes. Notre étude aide à comprendre les voies possibles de la formation des planètes de masse intermédiaire qui sont très courantes dans notre galaxie. Elle nous aide également à comprendre les disques protoplanétaires en général”, conclut Ravit Helled, co-auteur de l’étude, professeur d’astrophysique théorique à l’Université de Zurich et membre du PRN PlanetS.

Publication details: Formation of intermediate-mass planets via magnetically controlled disk fragmentation, Hongping Deng, Lucio Mayer and Ravit Helled, Nature Astronomy (2021)
DOI: 10.1038/s41550-020-01297-6

Categories: News

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