James Webb dévoile les secrets atmosphériques d’une exoplanète
Le télescope spatial James Webb (JWST) et ses images jamais vues de notre Univers nous offre une nouvelle première: en combinant plusieurs instruments, il dresse un portrait moléculaire et chimique de l’atmosphère de l’exoplanète WASP-39b. Il met notamment en évidence la présence d’eau, de dioxyde de carbone et surtout, pour la première fois, du dioxyde de soufre crée par des réactions déclenchées par la lumière de son étoile hôte. Ces résultats sont à découvrir dans la revue Nature au travers de cinq articles scientifiques. Des chercheuses de l’UNIGE et du Pôle de Recherche National PlanetS ont contribué à ces études. Le JWST est le fruit d’une collaboration entre l’Agence spatiale européenne (ESA) – dont la Suisse est membre depuis 1972 – la NASA et l’Agence spatiale canadienne (ASC).
WASP-39b est une géante gazeuse qui orbite autour de son étoile hôte à une distance très proche. Elle met ainsi un peu plus de 4 jours pour compléter une orbite de l’étoile ce qui, dans le cas de la Terre, prend une année complète. Cela signifie que la température sur cette exoplanète est supérieure à 900 degrés, un environnement extrême hostile à la vie. WASP-39b est l’une des premières cibles d’observation du télescope JWST Elle a également été observée par d’autres télescopes spatiaux par le passé, qui ont révélé des composants isolés de l’atmosphère de cette planète bouillante. Aujourd’hui, le JWST en dresse un portrait complet, composé d’atomes, de molécules et de nuages. De plus, des signes de chimie active sont détectés: les molécules de l’atmosphère interagissent avec la lumière en provenance de l’étoile facilitant certaines réactions chimiques menant à la création de nouvelles molécules.
«Nous avons observé WASP-39b avec plusieurs instruments qui se trouvent à bord du JWST. Combinés, ils nous permettent d’accéder à une panoplie d’empreintes chimiques inaccessibles jusqu’à présent. Des données comme celles-ci changent la donne», déclare Monika Lendl, professeure assistante au Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’UNIGE et co-investigatrice de l’étude.
De précieuses informations
Pour étudier WASP-39b, le JWST a observé la planète lorsqu’elle passait devant son étoile, permettant à une partie de la lumière de cette dernière d’être filtrée par l’atmosphère de la planète. Les différents éléments chimiques présents dans l’atmosphère absorbent différentes couleurs de la lumière de l’étoile, de sorte que les couleurs manquantes indiquent aux astronomes quelles molécules sont présentes. Ces observations ont permis la première détection dans l’atmosphère d’une exoplanète de dioxyde de soufre, une molécule produite par des réactions chimiques déclenchées par la lumière à haute énergie de l’étoile hôte de la planète. Sur Terre, la couche d’ozone protectrice de la haute atmosphère est créée de manière similaire.
Parmi les autres constituants atmosphériques détectés par le JWST figurent le sodium, le potassium et la vapeur d’eau, ce qui confirme les observations antérieures des télescopes spatiaux et terrestres. «Le moment où j’ai affiché pour la première fois les résultats de mon analyse a probablement été le moment le plus excitant de ma carrière jusqu’à présent. Il y avait une détection claire de l’eau mais aucune trace de méthane.», rappelle Dominique Petit dit de la Roche, chercheuse postdoctorale au Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’UNIGE, qui a réalisé une partie importante de l’analyse. «L’inventaire chimique de WASP-39b suggère que la planète s’est assemblée par une succession de fusions avec des corps plus petits, et que sa formation s’est originellement déroulée loin de l’étoile centrale», ajoute la chercheuse.
Nouvelles découvertes attendues
La proximité de la planète avec son étoile hôte en fait un laboratoire idéal pour étudier les effets du rayonnement des étoiles hôtes sur les exoplanètes. «Pouvoir observer cette connexion étoile-planète permettra de mieux comprendre comment l’énergie qui pénètre dans l’atmosphère régit le climat planétaire et comment les atmosphères planétaires sont modifiées par les réactions chimiques déclenchées par la lumière des étoiles», ajoute Monika Lendl.
Lancé en décembre 2021 et situé à 1,5 million de kilomètres de la Terre, JWST commence tout juste à produire des résultats scientifiques. Dans les années à venir, une multitude de découvertes spectaculaires sont attendues grâce à sa capacité unique à explorer notre Univers.
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