Les échantillons d’astéroïdes récupérés pourraient révéler des secrets du cosmos
Les échantillons prélevés sur l’astéroïde Ryugu par la mission Hayabusa2 de l’Agence japonaise JAXA sont de retour sur Terre. Les scientifiques du Pôle de recherche national PlanetS espèrent en apprendre davantage sur notre propre système stellaire et sur les autres et peut-être trouver des indices sur l’origine de la vie sur Terre.
Si ce n’était les arbustes verts et les arbres secs occasionnels, on pourrait confondre le site de l’atterissage de la sonde avec la surface rouge de Mars. Bien qu’il ait l’air d’un autre monde, le polygone de tir de Woomera, dans l’Outback australien, est bien l’endroit la sonde Hayabusa2 a atterri. Elle avait été larguée quelques heures avant de passer devant la Terre, presque exactement six ans après son lancement et avoir parcouru un total de 5,24 milliards de kilomètres.
Le 6 décembre, la capsule et sa précieuse cargaison ont été récupérées par les autorités locales et l’Agence japonaise d’exploration aérospatiale (JAXA), qui l’ont ensuite envoyée au Japon pour analyse.
Les sables noirs de Ryugu
Le 16 décembre, le directeur du projet, Yuichi Tsuda, a informé que le forage de Ryugu avait effectivement réussi et que la capsule contenait plus de cinq grammes de sable noir prélevé sur l’astéroïde. L’engin spatial a recueilli les échantillons en février et juillet de l’année dernière, à la fois en surface et sous la surface, ce qui a été révélé par un impact artificiel qui a créé un cratère de 10 mètres de diamètre.
Tsuda a déclaré que “la matière extraterrestre des astéroïdes dont nous avons tant rêvé est maintenant entre nos mains”.
Une fenêtre sur l’histoire cosmique et même davantage
Ryugu est un astéroïde actuellement situé à environ 9 millions de kilomètres de la Terre. C’est un astéroïde dit de type C et, en tant que tel, on pense qu’il n’a presque pas été modifié depuis sa formation, il y a des milliards d’années. Lors de sa formation, l’astéroïde a été fabriqué avec les matériaux pré-solaires, gaz et poussière, avec lesquels se sont également formés le Soleil et notre planète. Cependant, contrairement à la Terre, où les processus géologiques ont continuellement changé la matière, sur Ryugu, cette matière a été largement conservée. “Cela en fait une grande source d’informations sur les conditions du système solaire primitif”, explique Martin Jutzi, chercheur principal à l’Université de Berne et membre du PRN PlanetS.
Pour accéder à l’information, des instruments spéciaux sont nécessaires. L’un des instruments les plus précis au monde est le spectromètre de masse “Tom Dooley” de l’ETH Zurich. Il a été spécialement conçu pour mesurer les plus petites quantités de gaz et a déjà été utilisé pour examiner les échantillons d’astéroïdes de la mission Hayabusa, qui a échantillonné un autre astéroïde. “À l’époque, nous avons utilisé Tom Dooley pour déterminer l’exposition de la matière aux rayons cosmiques et nous avons appris l’activité de surface de l’astéroïde”, se souvient Henner Busemann, scientifique principal au département des sciences de la Terre et membre du PRN PlanetS. Lui et ses collaborateurs font à nouveau partie de l’équipe scientifique internationale qui sera probablement amenée à examiner des échantillons de gaz et peut-être aussi une partie du matériau solide.
Maria Schönbächler, professeur à l’Institut de géochimie et de pétrologie de l’EPF de Zürich et membre de PlanetS, fait également partie de l’équipe scientifique. Elle est spécialisée dans les analyses isotopiques de haute précision (les isotopes sont des atomes avec le même nombre de protons mais un nombre de neutrons différents). Elle pourrait ainsi déterminer si le matériau de l’astéroïde Ryugu est quelque chose de complètement nouveau ou si des corps similaires ont déjà heurté la Terre dans le passé. “Pour ce faire, les éléments individuels de l’échantillon doivent être séparés par un traitement à l’acide”, dit-elle. Elle aura toutefois besoin de quelques milligrammes de matière pour effectuer les analyses. On ne sait pas encore si cela sera possible.
Outre des informations sur le système solaire, les échantillons peuvent contenir des indices sur l’origine de l’eau, des molécules organiques et, par extension, sur l’histoire de la vie sur Terre, puisque des astéroïdes similaires ont pu entrer en collision avec la Terre au cours de son histoire. Martin Jutzi, qui a étudié Ryugu pendant des années, espère en apprendre davantage en comparant les résultats des analyses des échantillons avec ses simulations informatiques de la formation et de l’évolution des petits corps cosmiques ainsi qu’avec les images précédentes de la surface de l’astéroïde. “L’examen des échantillons qui sont revenues devrait permettre d’obtenir des informations scientifiques importantes”, conclut M. Jutzi.
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