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Ce que l’âge des planètes nous apprend sur leur teneur en eau

Il est bien connu que l’eau est nécessaire à la vie, mais une planète contenant trop d’eau n’est pas habitable. La teneur en eau des planètes extrasolaires est donc déterminante dans l’étude de leur habitabilité. Yann Alibert, Science Officer du Pole de Recherche National PlanetS, nous montre que l’observation des planètes à différents âges permet de contraindre statistiquement sur leur contenu en eau, un résultat important pour les missions spatiales futures.

Les astronomes mesurent avec des télescopes le rayon des exoplanètes en transit passant devant leur étoile. Si on connait leur masse, calculer leur densité est aisé, mais cela ne suffit pas à déterminer leur composition exacte. Yann Alibert, leader du groupe ERC PLANETOGENESIS à l’Université de Bern, nous explique: ”Une densité moyenne peut nous indiquer une présence d’eau sur la planète, mais il pourrait aussi s’agir d’une combinaison de silicate et fer de forte densité mêlés à du gaz de faible densité. »

« Observer des planètes, c’est un peu comme observer des gens, vous pouvez en déduire des détails cachés », nous dit l’astrophysicien Yann Alibert. (Photo: meienberger-photo)

« Observer des planètes, c’est un peu comme observer des gens, vous pouvez en déduire des détails cachés », nous dit l’astrophysicien Yann Alibert. (Photo: meienberger-photo)

En plus de la masse et de la taille, les chercheurs ont donc besoin d’une information supplémentaire pour déterminer si la planète est riche en eau. Mais laquelle ? Presque par hasard, une solution est apparue à Yann Alibert. Il y a deux ans, alors qu’il était invité à donner une conférence, il eut l’idée d’étudier l’impact de l’âge des étoiles autour desquelles transitent les exoplanètes. Selon la théorie actuelle, les planètes et leur étoile se forment simultanément et ont donc le même âge.

« C’est un peu comme si vous regardiez un groupe de gens » nous dit Yann Alibert. « Vous pouvez juger de leur taille et leur corpulence, mais vous pouvez en savoir si vous avez leur âge par exemple, vous pourriez déduire que les jeunes ont généralement plus de muscle. » Comment la masse, le rayon et l’âge combinés des exoplanètes permettent-ils de prédire leur structure interne ? Pour répondre à cette question, Yann Alibert a calculé l’évolution de planètes de compositions diverses sur des milliards d’années. « Nous avons montré que bien que partageant le même rayon et la même masse à un temps donné, ces planètes peuvent avoir des rayons différents à d’autres moments ». Le chercheur a résumé ces résultats dans une publication disponible en ligne dans le journal Astronomy et Astrophysics.

L’astrophysicien a calculé que l’évolution temporelle du rayon dépend de la quantité d’eau dans la planète. La quantité d’eau conditionne en effet sa capacité calorifique et son énergie gravitationnelle. La différence énergétique implique que la vitesse de refroidissement et donc de contraction diffère entre planètes riches ou pauvres en eau, et donc que les planètes se contractent différemment. La différence est petite, mais suffisante pour être mesurée en comparant deux ensembles de planètes de masse similaire mais d’âge diffèrent.

« En bref, vous observez une population de planètes de 5 milliards d’années », nous explique Yann Alibert : «Puis vous observez une population de planètes beaucoup plus jeunes, par exemple 500 millions d’années, et vous comparez leur rayon. Ceci vous donne une estimation de leur vitesse de contraction, et cela peut être relié à la quantité d’eau présente dans la planète. Ainsi, vous pouvez démontrer que certaines planètes sont riches en eau : » La méthode parait simple, mais c’est un peu plus compliqué. « L’idée est intuitive, mais la méthode statistiques présentée dans l’article n’est pas simples”, admet le chercheur. Dans son modèle, il a étudié des planètes de faible masse, Super-Terres et Neptunes, comportant 4 couches : un noyau, un manteau de silicate, un manteau de glace et une enveloppe de gaz, modélisant la structure interne de centaines de milliers de planètes.

Malgré les hypothèses et les approximations, Yann Alibert est convaincu que les missions spatiales futures permettront  d’appliquer cette méthode sur des exoplanètes en transit : « Les observations de transit qui seront faites par CHEOPS, TESS ou PLATO seront capables d’obtenir des contraintes statistiques sur la composition des planètes grâce à ce modèle, si toutefois l’âge de l’étoile est connu avec suffisamment de précision et si on peut observer un nombre suffisant de planètes de masse et rayon assez précis. »Ceci devrait permettre de mieux comprendre la formation de planètes et leur potentielle habitabilité.

Y.Alibert: Constraining the volatile fraction of planets from transit observations, A&A, 2016
http://dx.doi.org/10.1051/0004-6361/201425458

Kitzmann, Alibert et al.: The unstable CO2 feedback cycle on ocean planets, MNRAS, 2015
http://dx.doi.org/10.1093/mnras/stv1487

Y.Alibert: On the radius of habitable planets, A&A, 2014
http://dx.doi.org/10.1051/0004-6361/201322293

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