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De l’eau liquide à longue échéance même sur des planètes dissemblables à la Terre ?

L’eau liquide est une condition essentielle pour que la vie puisse se développer sur une planète. Contrairement à ce que l’on supposait jusqu’à présent, des scientifiques de l’Université de Berne, de l’Université de Zurich et du Pôle de Recherche National (PRN) PlanetS ont révélé dans une nouvelle étude que l’eau pourrait également exister à l’état liquide pendant des milliards d’années sur des planètes très différentes de la Terre. Cela remet en cause notre actuelle conception très géocentrique des planètes potentiellement habitables.

Les planètes de faible masse dotées d’une atmosphère primitive d’hydrogène et d’hélium pourraient avoir des conditions de température/pression qui permettent la présence d’eau liquide. La présence d’eau liquide est favorable à la vie, de sorte que ces planètes pourraient abriter des habitats exotiques pendant des milliards d’années. © (CC BY-NC-SA 4.0) – Thibaut Roger – Universität Bern – Universität Zürich

La vie sur Terre a commencé dans les océans. Pour la recherche de vie sur d’autres planètes, la possibilité d’eau liquide constitue donc un élément clé. Pour la trouver, les scientifiques se sont traditionnellement intéressés aux planètes qui ressemblent à la nôtre. Pourtant, des conditions similaires à celles sur Terre ne conditionne pas nécessairement la possibilité d’avoir de l’eau liquide à longue échéance. Des chercheuses et chercheurs de l’Université de Berne et de l’Université de Zurich, membres du Pôle de Recherche National (PRN) PlanetS, révèlent dans une étude publiée dans la revue scientifique Nature Astronomy que des conditions favorables pourraient même régner durant des milliards d’années sur des planètes ressemblant à peine à notre Planète bleue.

Des serres primitives
« L’une des raisons pour laquelle l’eau peut être liquide sur la Terre est son atmosphère », explique la coauteure de l’étude Ravit Helled, professeure d’astrophysique théorique à l’Université de Zurich et membre du PRN PlanetS. « Avec son effet de serre naturel, elle piège exactement la bonne quantité de chaleur pour créer les conditions idéales pour les océans, les fleuves et les pluies », poursuit la chercheuse.

À l’origine, l’atmosphère terrestre était cependant très différente. « Lorsque la planète s’est formée à partir de gaz et de poussière cosmiques, elle a constitué une atmosphère qui était principalement composée d’hydrogène et d’hélium – ce qu’on appelle une atmosphère primitive », précise Ravit Helled. Mais au fil de son évolution, la Terre a perdu cette atmosphère primitive.

D’autres planètes plus massives peuvent constituer des atmosphères primitives beaucoup plus grandes, qu’elles peuvent conserver indéfiniment dans certains cas. « Ces atmosphères primitives massives peuvent également provoquer un effet de serre – à l’instar de l’atmosphère terrestre actuelle. C’est pourquoi nous voulions savoir si ces atmosphères peuvent aider à créer des conditions nécessaires à l’eau liquide », ajoute Ravit Helled.

De l’eau liquide pendant des milliards d’années

Christoph Mordasini, Marit Mol Lous et Ravit Helled de PRN PlanetS, Université de Bern et Université de Zürich. Image: / mise à disposition

L’équipe a ainsi modélisé un grand nombre de planètes et a simulé leur évolution sur des milliards d’années. Pour ce faire, les scientifiques n’ont pas seulement pris en compte les propriétés de l’atmosphère des planètes, mais aussi l’intensité du rayonnement de leur étoile, ainsi que leur chaleur interne émise vers l’extérieur. Bien que sur Terre cette chaleur géothermique n’influe que très peu sur les conditions existant à la surface, elle peut jouer un rôle majeur sur les planètes possédant des atmosphères primitives massives.

«Nous avons découvert que, dans de nombreux cas, les atmosphères primitives ont disparu à cause du rayonnement intense d’étoiles, en particulier sur les planètes se trouvant très proches de leur étoile. Mais dans les cas où les atmosphères ont subsisté, il peut exister des conditions permettant la présence d’eau liquide », déclare Marit Mol Lous, doctorante et auteure principale de l’étude. Selon la chercheuse de l’Université de Berne et de l’Université de Zurich, « dans les cas où une quantité suffisante de chaleur géothermique atteint la surface, le rayonnement d’une étoile telle que le Soleil n’est même pas nécessaire pour que les conditions nécessaires à la présence d’eau liquide, existent à la surface».

«Le plus important est sans doute que notre étude montre que ces conditions peuvent persister pendant de très longues périodes – jusqu’à plusieurs dizaines de milliards d’années », souligne la scientifique, également membre du PRN PlanetS.

Élargir l’horizon de la recherche de formes de vie extraterrestres
« Cela pourrait en surprendre beaucoup. Les astronomes s’attendent normalement à ce que l’eau liquide puisse être présente dans les régions situées autour d’étoiles, qui reçoivent exactement la bonne quantité de rayonnement : ni trop pour que l’eau ne s’évapore pas, ni trop peu pour qu’elle ne gèle pas complètement », indique le coauteur de l’étude Christoph Mordasini, professeur d’astrophysique théorique à l’Université de Berne et membre du PRN PlanetS.

« La présence d’eau liquide étant probablement une condition pour que la vie existe, et la vie sur Terre ayant sans doute eu besoin de plusieurs millions d’années pour se développer, cela pourrait considérablement élargir l’horizon de la recherche de formes de vie extraterrestres. Selon nos conclusions, elles pourraient même se développer sur des planètes dites errantes, c’est-à-dire qui ne gravitent pas autour d’une étoile », selon Christoph Mordasini.

Le chercheur reste néanmoins mesuré : « Nos résultats sont certes passionnants, mais ils doivent être analysé avec prudence. Pour que ces planètes puissent accueillir de l’eau liquide à longue échéance, il faut en effet qu’elles possèdent une atmosphère de taille adéquate. Nous ne savons pas si c’est souvent le cas. »

«De plus, même lorsque les conditions adéquates sont réunies, la probabilité que la vie se développe dans un tel habitat potentiel si exotique reste encore inconnue. Cette question est pour les astrobiologistes. Avec notre étude, nous avons toutefois montré que notre vision géocentrique d’une planète favorable à l’apparition de la vie est peut-être trop étroite », conclut Christoph Mordasini.

Informations sur la publication:
Marit Mol Lous, Ravit Helled & Christoph Mordasini: Potential long-term habitable conditions on planets with primordial H-He atmospheres, Nature Astronomy, June 2022
DOI: 10.1038/s41550-022-01699-8
https://www.nature.com/articles/s41550-022-01699-8

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