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Le programme ATREIDES à la recherche des exo-Neptunes perdues

Une équipe scientifique internationale pilotée par l’Université de Genève (UNIGE) dont des membres du département d’astronomie de l’UNIGE, du Pôle de recherche National PlanetS, de l’Université de Warwick et de l’Institut d’Astrophysique des Canaries a lancé un programme ambitieux visant à cartographier les exoplanètes situées autour du désert des Netpunes chaudes afin de mieux comprendre les mécanismes d’évolution et de formation des systèmes planétaires. Cette expédition scientifique livre ses premiers résultats avec l’observation du système planétaire TOI-421. L’analyse de ce système révèlent une architecture orbitale étonnamment inclinée, offrant un nouvel aperçu de l’histoire chaotique de ces mondes lointains. L’étude, qui inaugure la collaboration ATREIDES, est publiée dans la revue Astronomy & Astrophysics.

Quels sont les mécanismes physiques qui gouvernent la formation et l’évolution des systèmes planétaires ? Pour répondre à cette vaste question, un groupe de scientifiques mené par le département d’astronomie de l’UNIGE a décidé de se concentrer sur un type d’exoplanète : les exo-Neptunes. Ces planètes de la taille de Neptune, 17 fois la masse de notre planète Terre, sont liées à plusieurs particularités dans la population des exoplanètes, notamment le désert des Neptunes chaudes.
En observant les orbites proches des étoiles, les scientifiques découvrent en effet très peu de planètes de masse intermédiaire (celle de Neptune) alors qu’ils observent foison de planètes plus massives (comme Jupiter) ou moins massives (seulement quelques masses terrestres). C’est cette absence de planète de masse neptunienne que les astronomes ont appelés le désert des Neptunes chaudes.

Récemment, des équipes internationales dont des membres de l’UNIGE, ont aussi pu mettre en lumière deux particularités supplémentaires dans la distribution des Neptunes : une zone plus tempérée – les planètes sont un peu plus éloignées de leur étoile que dans le Désert- appelé la Savane où les Neptunes sont plus fréquentes que dans le désert, et une zone de surdensité entre cette Savane et le désert nommée la crête Neptunienne. Ces spécificités de la population des Neptunes offrent alors un terrain de jeu idéal aux astronomes pour comprendre l’histoire des systèmes planétaires.

« La complexité du paysage exo-neptunien est une véritable fenêtre sur les processus de formation et d’évolution des systèmes planétaires. C’est ce qui a motivé une ambitieuse coopération scientifique, ATREIDES, qui s’appuie notamment sur un large programme d’observation que nous menons sur les plus grands télescopes européens, les VLT de l’ESO avec le spectrographe le plus précis au monde, ESPRESSO » précise Vincent Bourrier, Maitre d’Enseignement et de Recherche au sein du département d’astronomie de la Faculté des Sciences de l’UNIGE, investigateur principal du programme ATREIDES et premier auteur de l’étude publiée aujourd’hui dans le journal Astronomy & Astrophysics.

ATREIDES – A la conquête du désert

Le programme ATREIDES se focalise ainsi sur les exo-Neptunes afin d’identifier les processus responsables de la crête, de la savane et du désert neptuniens et en déduire une information plus générale sur l’évolution et la formation des planètes. Pour cela, les scientifiques planifient d’une part l’observation avec ESPRESSO d’un grand nombre de Neptunes et d’autre part, analysent et modélisent les données de toutes les planètes dans un cadre complet, homogène et cohérent. Cette approche systématique doit permettre une réelle comparaison entre les différents systèmes planétaires et une meilleure appréhension des mécanismes qui façonnent ce paysage neptunien complexe.

Conçu comme une initiative communautaire ouverte et internationale, la collaboration ATREIDES invite tous les astronomes intéressés à rejoindre l’effort scientifique autour de ces Neptunes, à l’image de l’université de Warwick qui contribue avec ses télescopes NGTS, un programme d’observation des exoplanètes par la méthode des transits – lorsqu’une planète passe devant son étoile- dont l’UNIGE est aussi partenaire.

« Nous utilisons NGTS pour observer le transit de ces Neptunes et ainsi optimiser notre utilisation d’ESPRESSO/VLT. Nous pouvons alors obtenir des mesures beaucoup plus précises ou encore identifier des processus, tels que les éruptions stellaires, qui pourraient influencer les données ESPRESSO » précise Daniel Bayliss, Professeur associé au Département de Physique de l’Université de Warwick.

Une première pincée d’Épice : Architecture Orbitale de TOI-421.

Le premier système ainsi observé et analysé dans le cadre d’ATREIDES se nomme TOI-421. Il possède deux planètes, une Neptune chaude TOI-421 c située dans la savane et une planète plus petite et plus proche de l’étoile, TOI-421 b. Les astronomes ont pu retracer l’histoire chaotique de ce système.

En effet, l’une des hypothèses que le programme ATREIDES souhaite adresser stipule que le paysage neptunien a été sculpté par la façon dont ces planètes ont migré de leur lieu de naissance vers leurs orbites actuelles. Certaines planètes migreraient doucement et tôt à travers le disque de gaz dans lequel elles se sont formées, un processus qui doit produire des orbites alignées. D’autres seraient violemment propulsées sur leurs orbites beaucoup plus tard à travers un processus chaotique appelé migration à haute excentricité, qui donne lieu à des orbites fortement désalignées.

L’une des variables clé de cette hypothèse est donc l’alignement entre le plan équatorial de l’étoile et le plan orbital de chaque planète. Pour TOI-421, les deux planètes du système sont fortement désalignées, ce qui est très différent de notre système solaire où les planètes sont alignées et tournent donc presque dans le plan équatorial de notre Soleil. Cela pointe vers une histoire mouvementée lors de l’évolution du système TOI-421 après sa formation.

L’Épice doit couler.

L’analyse de TOI-421 n’est qu’un avant-gout de la récolte à venir. Elle apporte de précieuses informations aux scientifiques mais permet, aussi et surtout, de perfectionner les outils d’analyse et de modélisation développés dans la collaboration ATREIDES. Un grand nombre de systèmes planétaires possédant des exo-Neptunes devront cependant être observés et analysés avec la même rigueur que celle appliquée à celui-ci avant de pouvoir dessiner les grandes lignes permettant la compréhension de l’évolution et de la formation des systèmes planétaires.

« Bien comprendre les mécanismes qui sculptent le désert des Neptunes chaudes, de la Savane et de la crête permettra de mieux comprendre la formation planétaire dans son ensemble…mais il est fort à parier que l’Univers nous réserve d’autres surprises qui nous forcerons à développer de nouvelles théories » conclut Vincent Bourrier avec quelques reflets bleus dans ses yeux.

 

 

Publication : https://www.aanda.org/10.1051/0004-6361/202554856

Categories: News

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